Le patrimoine à portée de main

L’art de la traduction, ou « conserver le sens absolument tel que l'auteur le présente »

Devenu indispensable dans nos sociétés modernes mondialisées, la traduction est néanmoins un art et un métier bien ancien. Hachette-BnF souhaite mettre en valeur plusieurs ouvrages présentant cet incontournable savoir, à travers les collections de la Bibliothèque nationale de France. 

Au début du XIXe siècle, Ferri de Saint-Constant affirme, dans son Traité de la traduction adressé aux quatrièmes et troisièmes : « La traduction est la méthode la plus simple, la plus courte et la plus sûre d'apprendre une langue. C'est le moyen le plus propre à développer l'esprit et à former le goût. » Deux manières différentes de traduire sont distinguées : la « version », soit la traduction littérale, et la « traduction proprement dite », qui a en plus « de la facilité, de la convenance, de la correction, et le ton propre au sujet ».

Selon Saint-Constant, traduire fidèlement c’est « en conserver le sens absolument tel que l'auteur le présente ; ce qui dépend de l'ordre des idées et de la valeur des mots ». Mais malgré tout, « [ce] qu'il y a de plus délicat s'évapore en passant dans une autre langue ». 

Trois siècles avant lui, Étienne Dolet, dans La Manière de bien traduire d'une langue en aultre publié en 1540, considère que la traduction requiert « principallement cinq choses ». En premier lieu, il faut que le traducteur « entende parfaictement le sens, & matiere de l’autheur » et « ait parfaicte congnoissance de la langue de l’autheur ». De plus, la traduction ne peut se contenter d’être seulement littérale : « il ne se fault pas asservir jusques à la, que lon rende mot pour mot ». Dans le cas d’une traduction du latin en langue vernaculaire, « il te fault garder d’usurper mots trop approchants du Latin, & peu usités par le passé ». Enfin, la règle d’écriture fondamentale – « de si grand’vertu », sans laquelle « toute composition est lourde, & mal plaisante » – est « l’observation des nombres oratoires », c’est-à-dire le nombre de syllabes et le rythme de la phrase. L’humaniste écrit même : « Conclusion quant à ce propos, sans grande observation des nombres ung Autheur n’est rien ».

Vesin de Romanini, dans le Traité d'obscurigraphie et La Cryptographie dévoilée qui lui fait suite, s’intéresse plus particulièrement au décryptage d’écritures codées, procédé analogue à la traduction de véritables langues : « Considérant toutes les langues écrites, étrangères, comme de véritables cryptographies, j'ai voulu, afin de rendre mon ouvrage aussi complet que possible, et surtout digne de l'attention publique, y appliquer encore la méthode, non-seulement au déchiffrement de tout écrit tracé dans quelque caractère et dans quelque langue que ce soit, mais aussi à l'intelligence de sa juste signification, sans qu'il soit nécessaire de savoir un seul mot de la langue à laquelle il appartient. » Ainsi, La Cryptographie dévoilée détaille le déchiffrement en français, allemand, anglais, latin, italien et espagnol, et la traduction en français de ces langues dans un « Précis analytique des langues écrites ».

Au XIXe siècle, alors que le latin est encore au cœur de l’enseignement, le Traité d'analyse grammaticale et d'analyse logique de Charles Mougey aborde le « gallicisme », « tournure propre à la langue française et dont l’analyse ne peut rendre compte » : « Il faut le remplacer par une autre expression équivalente par le sens, mais construite de manière qu'on voie clairement toutes les propositions et toutes les parties qui les composent. »

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